PERFECT DAYS

JAPON
2023 2h03
Réalisé par Wim Wenders
avec Koji Yakusho, Tokio Emoto, Arisa Nakano, Aoi Yamada, Yumi Asou, Sayuri Ishikawa, Tomokazu Miura, Min Tanaka

Festival de Cannes 2023 : Prix d’interprétation masculine pour Koji Yakusho

Hirayama travaille à l’entretien des toilettes publiques de Tokyo. Il s’épanouit dans une vie simple et un quotidien très structuré. Il entretient une passion pour la musique, les livres, et les arbres qu’il aime photographier. Son passé va ressurgir au gré de rencontres inattendues.

Mystérieuse alchimie du film de commande qui se transforme en œuvre d’art : c’est à partir d’un projet architectural sur les sanisettes à Tokyo et d’une proposition d’une série de courts métrages faite à Wim Wenders qu’est né PERFECT DAYS, qui marque aussi le retour à la fiction du réalisateur allemand.

Réflexion émouvante et poétique sur la recherche de la beauté dans le quotidien, PERFECT DAYS (en hommage à la chanson de Lou Reed) doit beaucoup à l’intensité de jeu de l’acteur Koji Yakusho, interprète quasi muet du personnage d’Hirayama, que l’on avait découvert autrefois dans les films d’Imamura. Sa discrétion, son attention aux choses et sa force tranquille face aux aléas de la vie, donnent à ce film « zen » une tonalité à la fois apaisante et foncièrement émouvante.

 

PERFECT DAYS vu par Jackie Willems, administratrice de l’association Cinema et cultures

Perfect Days, du quotidien dans l’art

Avec Perfect Days, Wim Wenders réussit le tour de force de nous faire suivre au plus près un employé du Tokyo Toilet Service sans que notre enthousiasme ne flanche une seconde.

Il y a quelques années, la ville de Tokyo a fait construire des toilettes publiques mettant en œuvre des technologies de pointe et très esthétiques.

Le fait que les parois de ces lieux d’aisance ne deviennent opaques que lorsquelles sont occupées ne pouvait qu’interpeler notre cinéaste, photosensible, lui aussi bien sûr, et préoccupé d’arts plastiques.

De l’urinoir de Duchamp aux toilettes publiques…..

La municipalité tokyoïte a demandé au réalisateur de faire des courts métrages documentant ces architectures dont l’utilisation a été retardée lors du confinement.Win Wenders a préféré faire œuvre de fiction dans un long métrage tourné en dix-sept jours.

La musicalité du film tient au rythme, aux répétitions des jours agrémentées de subtiles variations, liées aux rencontres fugaces et aux variations de la lumière. A la faveur de ces jeux d’ombre et de lueurs, Hirayama fait des prises de vue des branches des arbres, car Hirayama est avant tout un poète. Réellement doué pour la vie, il n’exclut rien de son émerveillement.

Il a choisi cette vie sans richesse matérielle, après avoir rompu avec une famille aisée. La rupture s’exprime par l’unique manifestation d’un profond chagrin, éphémère elle aussi. Son existence est agrémentée de lectures témoignant de sa passion pour la littérature qui donne lieu à des bribes de conversation avec une bouquiniste.

Le partage d’une vie sentimentale avec une femme n’est évoquée que de manière allusive, avec une sorte de détachement. La rencontre pourrait tenir des promesses, ou non.

Musicaux, également, les silences.

Pendant un long moment la parole est totalement absente. On peut croire que le personnage trouve une certaine sérénité dans son mutisme. Il préfère regarder le ciel; sa vue du fait naître son sourire chaque matin. Il accordera toutefois un moment d’amitié lorque son ombre croisera celle d’un être humain en déshérence qui, comme l’enfant qui s’est égaré, recueille son empathie.

Le regard pétillant, indulgent, Hirayama reste ouvert au monde, toujours prêt à accueillir l’instant.

La nuit,ses rêves en noir et blanc s’harmonisent pour former des poèmes visuels dont ne subsistent, de la vie diurne, que des fulgurances.

Ce film est musical aussi parce que ponctué d’extraits de chansons anglo-saxonnes des années 70 (d’où le titre, référence à la chanson de Lou Reed, qui, au singulier, décrit le bonheur des gestes simples de la journée qui apportent la sérénité). L’anachronisme de ces intermèdes n’est pas un obstacle au propos de l’ensemble et ces chansons apportent de manière épisodique des moments d’allégresse.

Wim Wenders a su respecter l’esprit zen et revendique l’influence d’Ozu, même s’il filme peu à hauteur de tatami et que le tournage caméra à l’épaule ajoute à la contemporéanité du contexte, traduite dans les superbes clichés de la ville dans sa modernité.

Wim Wenders, avec la collaboration de Takuma Takasaki pour le choix des acteurs et l’écriture du scénario, nous donne une leçon de sagesse. Si ce n’est pas vraiment le bonheur, ça lui ressemble…

Jackie Willems

« Perfect Days nous plonge dans la société japonaise où on y suit un homme, nettoyeur de toilettes publiques. On y retrouve sa routine, sa solitude. Le film nous invite à découvrir une vie ordinaire au quotidien modeste où l’on se demande si on pourrait se satisfaire de vivre ainsi. Avec son scénario simple mais efficace, Perfect Days permet à n’importe quel spectateur de s’identifier au personnage, campé magnifiquement bien par l’acteur Koji Yakusho. On le suit dans une belle fresque de 2 heures, ponctuée de plusieurs rencontres, sans jamais en sortir.  » Alexandre du ciné-club Les Passagers

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